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Alain Rochard (ESEO 1987)

Portraits d'Ingénieurs

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10/04/2020

Parcours

Je travaille depuis plus de 30 ans et je pourrais dire que j'ai eu trois vies professionnelles : une première dans le prolongement de ma formation ESEO dans des fonctions techniques en informatique, une seconde orientée vers le marketing et la vente et une troisième dans l'entrepreneuriat et les ressources humaines. Reste à savoir s'il y en aura une dernière avant la retraite…

En 1987 quand j'ai eu mon diplôme à l'ESEO, les étudiants avaient en gros deux options : travailler dans l'électronique et les télécommunications et rester dans l'Ouest (Anjou, Bretagne, Pays de Loire) ou travailler dans l'informatique plutôt en région parisienne. C'est ce deuxième choix que j'ai fait. J'ai fait un autre choix qui était de démarrer en SSII (société de service en informatique) pour pouvoir découvrir des multiples environnements et avoir des expériences variées.

J'ai donc rejoint la SSII GFI informatique en 1987, société qui intervenait sur des projets autour de l'informatique de gestion pour les grandes entreprises. Il y avait de fortes possibilités d'évolution et j'en ai profité. En 4 ans j'ai évolué d'un poste de d'Ingénieur développement à Chef de projet puis Directeur de projets. J'ai travaillé pour des sociétés aussi variées que SCOR (assurances), BP (pétrole), Société Générale (banque) ou Solvay (chimie).

J'ai assez vite senti que j'étais d'avantage intéressé par les aspects relationnels que techniques et que j'aimais appréhender les besoins des utilisateurs et proposer des solutions. J'ai donc décidé de m'orienter vers les métiers du marketing et de la vente. En 1991 j'ai rejoint Software AG, un éditeur de logiciels allemand, à un poste de consultant marketing-produit. Puis j'ai tout naturellement migré vers la vente, d'abord dans des fonctions de consultant avant-vente (un poste intermédiaire entre la technique et la vente) puis à un poste d'ingénieur commercial. J'ai plutôt bien réussi dans ce métier mais je sentais que j'avais besoin de travailler avec une équipe et de dynamiser des collaborateurs. J'ai donc pris des responsabilités de management en tant que directeur d'une business unit (qui comprenait des commerciaux, des avant ventes et des consultants), membre du comité de direction.

Travailler chez cet éditeur aura été une expérience très enrichissante, d'abord parce que j'ai pu pratiquer différents métiers, ensuite parce que c’était dans un contexte international et enfin parce que les choses vont vite chez un éditeur de logiciels, qu'il y a sans cesse des innovations et que ces caractéristiques correspondent bien à mon caractère. J'ai quitté l'entreprise au bout de 7 ans lorsque les produits dont je m'occupais ont été revendus à une autre entreprise. Je n'ai pas souhaité continuer.

En 1998, c'est le gros changement dans ma carrière puisque je quitte l'informatique pour le conseil en recrutement. C'est arrivé un peu par hasard : j'avais contacté un cabinet de recrutement (Garon Executive) qui m'avait proposé une rencontre. Le poste dont on me parlait ne m'intéressait pas. Mais à la fin de l'entretien, la responsable du cabinet m'a demandé si je n’étais pas intéressé par le développement d’une activité recrutement en informatique dans le cabinet. J'avais bien aimé recruter pour mes propres équipes les années précédentes, je me suis donc dit : pourquoi pas ?

J'ai commencé par informatiser le cabinet (toute l'information était sous forme papier), connecter tout le monde à Internet (en 1998 très peu d'entreprises étaient connectées), former les collaborateurs et... signer mes premiers clients. Quatre ans plus tard, l'activité recrutement IT représentait une bonne partie du revenu du cabinet, et l'envie d'avoir mon propre cabinet me démangeait… Je me suis lancé en 2002.

Le cabinet

Le cabinet ITGS est un cabinet d'Executive Search qui intervient sur des recrutements clés dans le domaine IT/Digital/Data.

Nous avons deux types de clients :

 Les fournisseurs de solutions (éditeur de logiciels, start-up, société de conseil et de service). Nous les aidons à recruter leurs managers (DG, directeur commercial, directeur technique...) ainsi que des commerciaux. Nous travaillons pour des sociétés françaises et étrangères (majoritairement US), de très grande taille comme des très petites structures (startups). Quelques noms : IBM, SAP, Salesforce, Business Objects, Red Hat, Capgemini, Contentsquare, Corum...

 Les utilisateurs de solutions. Ce sont aussi bien des grands groupes que des TPE/PME, issus de tous secteurs d'activité. Nous les aidons à recruter leurs managers IT (DSI, Directeur digital, Directeur technique...) ainsi que des experts (architectes...). Quelques noms : AXA, Carrefour, Paris Saint-Germain...

La rémunération moyenne des candidats que nous recrutons est de 150.000 euros par an. La moyenne d'âge est de 38 ans.

Lorsque j'ai créé le cabinet, j'avais l'ambition d'apporter à nos clients et à nos candidats la qualité de service que j'aurais aimé trouver lorsque j'étais moi-mème manager ou en recherche de poste. Cela signifie un conseil éclairé et bienveillant qui s'appuie sur une réelle connaissance des métiers et des écosystèmes, une démarche à la fois rapide et très qualitative, et des résultats - le seul résultat qui compte à la fin étant que les professionnels que nous recrutons soient heureux d'aller travailler le matin, qu'ils réussissent dans leur poste, et qu'ils évoluent sur la durée dans l'entreprise.

À ce jour, Nous avons recruté près de plus de 500 collaborateurs pour 150 entreprises.



3+1 tendances pour le recrutement en 2020

1. La fin des carrières linéaires

Mon père a fait l'intégralité de sa carrière dans une même entreprise et a exercé le même métier en occupant 3 postes différents.

J’ai travaillé pour 4 entreprises (dont la mienne) et j'ai exercé 3 métiers différents (le développement informatique, la vente logicielle, l'entrepreneuriat dans les ressources humaines) en occupant 9 fonctions différentes.

Qu'en sera-t-il pour vous ?

On estime que vous exercerez en moyenne 10 métiers différents dans votre vie professionnelle, et que les 3/4 des métiers que vous exercerez dans 10 ans n'existent pas encore !

Mais vous ne vous contenterez pas de changer, vous serez également initiateurs et acteurs d’une profonde modification dans la relation à l’entreprise.

 64% d’entre vous estiment qu'exercer plusieurs activités professionnelles en même temps sera la norme dans 10 ans (c’est déjà le cas pour les fameux slashers) ;

 1/3 préféreront avoir un statut de free-lance plutôt que salarié et la moitié préféreront travailler en nomade ou de chez eux ;

 Et si vous êtes insatisfaits, vous ferez comme plus de 40% des jeunes professionnels qui décident de rompre leur CDI avant le premier anniversaire.

Un marché du travail toujours plus changeant et une relation à l’entreprise toujours plus « lâche » … deux tendances fortes qui demanderont de grandes capacités d’adaptation et d’anticipation.


2. De l'importance du réseautage

Lorsque j'ai cherché mon premier poste en 1987, j'ai fait comme tout le monde à l’époque : j'ai ouvert un journal et je me suis jeté sur les petites annonces publiées en fin de journal. J'ai envoyé par courrier un CV accompagné d'une lettre de motivation manuscrite (pour l'inévitable analyse graphologique) et j'ai croisé les doigts pour que le téléphone (fixe) sonne rapidement…

Il y a 15 ans, ont déposait son CV dans une CV thèque numérique (Monster, Emailjob …) et on postulait en ligne ou par mail.

Aujourd'hui, ce mode de recherche est toujours d'actualité mais les réseaux sociaux jouent un rôle de plus en plus important dans la recherche d'emploi. Je parle des réseaux sociaux professionnels (principalement Linkedin - 700 millions de membres dont 19 millions en France) et parfois les réseaux sociaux « personnels » comme Facebook ou Twitter.

À quoi vous servent ces réseaux sociaux ? À présenter son parcours et ses compétences, à identifier les entreprises qui nous intéressent, à contacter des personnes qui recrutent ou qui peuvent faciliter la mise en relation avec des recruteurs, à trouver des offres d'emploi et à postuler, mais aussi â se faire « chasser » par les recruteurs.

Aujourd'hui la plupart des recruteurs sont présents et actifs sur Linkedin. Il est donc très important, surtout quand on travaille dans le domaine de la technologie, d'être également présent et actif : avoir un profil complet et à jour et développer un réseau avec lequel on interagit régulièrement… En ayant en tête la maxime fondatrice du réseautage : pour obtenir quelque chose, il faut aussi savoir donner.

Mais attention à ne pas tomber dans le piège du « tout numérique », surtout dans l'optique d’une deuxième partie de carrière. D’abord parce qu’il faudra pouvoir compter sur des personnes de confiance pour réussir à décrocher des postes à responsabilité. Mais aussi parce que ce réseau de confiance sera capital pour réussir à… rebondir lorsqu’on sera considéré comme étant « trop senior » pour être embauché. Or il est rare qu'on ait envie de se mettre en quatre pour quelqu'un qu'on n’a jamais rencontré… de l ’importance des rencontres IRL – in real life !


3. L'intelligence artificielle bouleverse le paysage…

Depuis quelques années, la capacité des systèmes informatiques a tellement progressé qu’elle rend possible l'exécution en quasi temps réel de traitements manipulant de très larges volumes de données et s’appuyant sur l'intelligence artificielle. Les applications ? Aujourd’hui, ce sont les recommandations par Netflix de nouvelles séries en fonction de l’historique des téléspectateurs. Demain, ce sera la voiture autonome…

Dans le domaine du recrutement, ce sont des chatbots qui interagissent avec les candidats pour renseigner sur un poste à pourvoir ou procéder à une première qualification. Demain, ce sont des systèmes qui scruteront le candidat en entretien, qui analyseront le discours, la gestuelle, le ton de la voix… pour connaître la personnalité et l’état émotionnel du candidat. Et même prédire la probabilité

de succès dans un poste ou la compatibilité avec les futurs collègues (on parle ici de recrutement affinitaire) …

Ces IA ont-elles vocation à remplacer complètement l'humain et à gérer l'intégralité du process de recrutement ? Je ne le pense pas car nous possédons des qualités uniques et indispensables : l’intelligence relationnelle ou émotionnelle (sensibilité, empathie…), l’intuition, la créativité, la capacité à sortir du cadre et à prendre des risques…

L’IA prendra évidemment le pas pour l'ensemble des tâches qui impliquent l'exécution de process répétitifs, complexes ou évolutifs, ou encore l’analyse et la mise en perspective de très larges volumes de données. Et elle le fera bien mieux que l’homme ! Ce dernier se concentrera sur les taches à très forte valeur ajoutée ou à fort contenu émotionnel (sentir, rassurer, convaincre, décider…).

… et la technicité ne suffit plus !

Ce que nous vivons dans le recrutement concerne en fait l'ensemble des métiers, et les technologies ne font pas exception à la règle.

Par exemple en informatique, les IA sont aujourd’hui capables de surveiller des infrastructures complexes et d'anticiper d'éventuelles pannes ou dysfonctionnements (analyse et maintenance prédictive). Elles seront demain capables de développer des systèmes informatiques avec un niveau de fiabilité inconnu à ce jour…

Dans ces conditions, quel sera le rôle de l’ingénieur système ou du développeur ? Faire ce que la machine ne saura pas faire en exploitant des capacités d’abstraction et des qualités (relationnelles, créativité, intuition…) inimitables. On ne fera sans doute plus de programmation ou de supervision système mais on imaginera des logiciels innovants, on trouvera des solutions à des problèmes inédits, on rassurera des interlocuteurs inquiets et on convaincra des investisseurs méfiants face à une nouvelle technologie…

On comprend alors l’attention toujours plus importante que les recruteurs portent â la – difficile - évaluation des soft Skills des candidats – anglissisme qu’on pourrait traduire par qualités émotionnelles et comportementales.


Conseils d’un ancien aux futurs ingénieurs ESEO

Difficile de donner des conseils tant les attentes et les motivations des uns et des autres sont aussi différentes que nous sommes différents. Mais je me risque quand même à l’exercice – en mettant l’accent sur l'état d’esprit plus que sur la pratique.

- Soyez curieux, intéressez-vous à la nouveauté. Votre monde sera un monde de ruptures, il faudra s’y adapter.

- N’ayez pas peur du changement, espérez-le. C’est dans le changement qu’on trouve de nouvelles motivations.

- Saisissez les opportunités ou mieux, créez-les. Il vaut mieux tenir la barre que subir le roulis, surtout quand le vent souffle fort.

- Anticipez, ne vous laissez pas surprendre. Trop de personnes arrivent sur un obstacle sans être préparées et armées.

- Ne vous enfermez pas dans la technique et développez vos qualités relationnelles. Ou alors devenez un expert incontournable qui se remet sans cesse en question.

- Exercez un métier - ou plutôt des métiers - qui vous rendent heureux. Si ce n’est pas le cas, changez. Vous avez la chance de bénéficier d’une solide formation qui vous ouvrira des portes et qui vous permettra de vous adapter. Profitez-en pour tester et trouver votre voie.

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